jeudi 9 janvier 2014

Le mur



Je m'appuyai contre le mur et fermai les yeux.

Enfin, il était presque terminé, c'était un pari pour moi de jouer au maçon.

Mais fallait que je m'isole de ces voisins envahissants et bruyants.

J'avais décidé de prendre des distances avec ce monde en déliquescence et le mieux était donc de construire un mur très haut, tout autour de mon jardin.

Un jour donc je commence par le côté Nord, le plus sinistre, le côté par lequel arrivaient les plus grands nuisances et puis en plus le nord, c'est froid, le vent du nord.

Cela fait bientôt plus de huit jours que je travaille à cet édifice et je suis plutôt satisfait, ça avance bien je ne vois plus les voisins ni devant ni derrière, ni devant ni à droite ni à gauche…

Évidemment il y a un peu d'ombre du coup dans le jardin deux mètres de hauteur ce n'est pas rien!

Mais quel calme!

Je suis enfin tranquille!

J'adore, c'est fantastique.

J'adore ce mur c'est mon mur.

Il ne m'enferme pas d'ailleurs ; maintenant que j'ai un mur je vois la mer, je vais même à la montagne.

Mon mur me fait voyager....il suffit que je m'en approche et soudain il m'attire, il me happe et d'un seul coup je suis ailleurs.

Hier je suis allé dans le désert, c'était bien !!! Je n'y étais jamais allé.

Et là figurez -vous c'est immense, il n'y a pas d'obstacle....et pour le coup aucun mur non plus.......on peut voir très loin......à vrai dire on peut y voir des choses un peu irréelles et j'avoue tout de même que de temps et temps je distingue des murs au lointain un peu flous certes et quand je me rapproche les murs ont disparu.

Alors, je préfère retourner dans mon mur et venir me reposer chez moi.

Je fais des voyages maintenant, je découvre le monde mais c'est tout de même fatiguant de se démurer si souvent

C'est bien, je ne suis plus emmuré dans mes rêves et je découvre la vraie vie, à chaque fois des paysages nouveaux, des rencontres différentes !

Mais à chaque fois, je dois revenir, c'est plus fort que moi, je ne sais pas pourquoi.

Un jour que j'étais rentré j'ai voulu lever les yeux au ciel et là je n'ai rien vu, enfin si j'ai vu un mur au-dessus de ma tête et depuis ce jour, je ne peux plus faire le mur, certes j'essaye d'aller dans le mur mais sans succès, je crois que suis mûr.

Alors finie la découverte, terminée l'oxygène je reste claquemuré.


(C) Philippe GILBERT

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